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Financial Crime

Audition de témoins sollicitée par le prévenu: la Cour de cassation rappelle les conditions dans lesquelles cette demande peut être rejetée

 

Dans un récent arrêt du 15 novembre 2017, la Cour de cassation a été amenée à censurer un arrêt rendu par la Cour d’appel de Bruxelles (chambre correctionnelle) du 20 janvier 2017 qui avait refusé de faire droit à la demande d’audition de témoins demandée par le prévenu.

En substance, les faits tels qu’ils ressortent de la décision commentée peuvent se résumer comme suit.

Monsieur G. – demandeur en cassation – est poursuivi du chef de coups et blessures volontaires envers des agents dépositaires de la force publique et de rébellion.

Devant la Cour d’appel de Bruxelles, Monsieur G. a sollicité l’audition séparée des policiers et d’autres témoins à l’audience demande qui a été formalisée dans des conclusions écrites.

La Cour d’appel de Bruxelles a rejeté cette demande et a condamné Monsieur G.

Celui-ci s’est pourvu en cassation.

Dans son arrêt, la Cour de cassation rappelle que :

« En vertu de l’article 6.3.d, de la Convention, toute personne poursuivie du chef d’une infraction a le droit d’interroger ou de faire interroger les témoins à charge et d’obtenir la convocation et l’interrogatoire des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge.

D’une part, ce droit n’est pas absolu, le juge pouvant accepter ou refuser une telle demande selon qu’elle apparaisse ou non utile à la manifestation de la vérité et dans le respect de l’équité du procès.

Lorsqu’une audition de témoin est demandée par voie de conclusions, le juge, s’il n’y fait pas droit, doit y répondre et préciser la raison de l’inutilité de la mesure d’instruction sollicitée pour forger sa conviction.

Par ailleurs, les articles 6.1 et 6.3.d, de la Convention exigent que, pour que puissent être prises en considération à titre de preuve des déclarations à charge recueillies durant l’enquête en l’absence de l’inculpé ou de son conseil, et alors que le prévenu, qui en a fait la demande au juge du fond, ne s’est pas davantage vu offrir la possibilité d’interroger leur auteur en qualité de témoin durant le procès, il y a lieu de rechercher :

  • s’il existe un motif sérieux justifiant la non-comparution du témoin et, en conséquence, l’admission à titre de preuve de sa déposition ;
  • si la déposition du témoin absent constitue le fondement unique ou déterminant de la condamnation ; et
  • s’il existe des éléments compensateurs, notamment des garanties procédurales solides, suffisants pour contrebalancer les difficultés causées à la défense en conséquence de l’admission d’une telle preuve et pour assurer l’équité de la procédure dans son ensemble ».

La Cour de cassation va donc vérifier si la décision critiquée a fait une juste application de cette grille de lecture à trois niveaux.

Dans un premier temps, la Cour de cassation observe que la décision querellée, qui a abouti à un verdict de culpabilité sur la base des déclarations et constatations des policiers visés par la demande d’audition formulée par Monsieur G., a refusé de faire droit à la demande d’audition aux motifs « que le rapport de ces policiers est précis, clair et cohérent, de telle sorte que leur audition séparée n’est pas nécessaire à la manifestation de la vérité (et) qu’il serait illusoire que les policiers, coutumiers ou non de ce type d’intervention, aient gardé un souvenir précis des faits dès lors que plus de deux ans se sont écoulés depuis leur commission ».

Par ces considérations, la Cour de cassation constate que l’arrêt a, d’une part, motivé la raison pour laquelle la mesure d’instruction n’était pas utile à la manifestation de la vérité et, d’autre part, exposé la raison pour laquelle il y avait un motif sérieux justifiant de ne pas convoquer les policiers.

Ceci étant, souligne la Cour de cassation, l’arrêt ne relève « aucun élément compensateur ayant pu permettre (aux juges d’appel) d’apprécier équitablement la fiabilité des accusations portées par les policiers, tandis qu’ils ont eu égard, pour reconnaître le demandeur coupable, à ces accusations ».

Outre cette dernière constatation, la Cour de cassation remarque que l’arrêt n’a pas répondu à la demande d’audition d’autres témoins (à décharge) pourtant formulée par Monsieur G. par voie de conclusions.

En conséquence, l’arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles est cassé.

 


Bruno Dessart
b.dessart@legacity.eu

 

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